Les projets 365 sont des projets photographiques communautaires où, pendant un an, les habitants envoient des images de leur quotidien. Des fragments de vie qui, mis bout à bout, dessinent l’identité d’un lieu. L’idée n’est pas seulement de la préserver : c’est aussi de changer la manière dont on regarde l’endroit où l’on vit.
Pendant des siècles, la peinture et le dessin ont interprété le réel. Puis la photographie a permis d’enregistrer les choses telles qu’elles étaient. Une révolution.
La première photo date de 1826, prise par Nicéphore Niépce ; la première à montrer des personnes date de 1838 (un cireur de chaussures sur le Boulevard du Temple à Paris) prise par Daguerre. Cela rappelle à quel point un simple geste photographique peut traverser le temps.
Avec le numérique, puis les smartphones, la photo est devenue un outil universel. Alors, pourquoi ne pas capturer la vie d’aujourd’hui, telle qu’elle se vit vraiment ?
Comment tout a commencé
En 2007, à Faversham, dans le Kent, où je vivais à l‘époque, j’ai lancé un appel aux habitants : raconter une année de la ville en images. Une photo par jour, par tout le monde, sans hiérarchie : amateurs, professionnels, curieux, passionnés.
C’était un pari, mais surtout une conviction : lorsqu’une communauté se met en mouvement, elle produit quelque chose qu’aucune institution ne pourrait créer seule.
Des centaines de photos ont été envoyées au cours de l’année. Une exposition et un livre ont a suivi. La ville y apparaissait sous toutes ses facettes : les lieux connus, les recoins oubliés, les habitudes du quotidien, les petites joies anodines. Faversham en était la vedette. Un portrait subjectif, forcément, mais sincère et vibrant.
Cette première édition n’a pas été simple à mener, mais l’énergie du public m’a poussée à continuer. Dix autres expositions ont suivi, en Angleterre puis en France (à Sceaux et au lycée Marie-Curie), rassemblant des milliers de visiteurs.
Ce que ces projets racontent
Les photos couvrent une diversité incroyable : maisons, travail, loisirs, objets du quotidien, paysages. Elles montrent que chacun regarde sa communauté à sa façon, et que ces regards, rassemblés, forment une mémoire collective.
Chaque projet 365 a une double valeur : artistique, parce qu’il révèle des sensibilités uniques ; et historique, parce qu’il fige un moment dans le temps.
Il renforce aussi le sentiment d’appartenance, donne une voix à ceux qui habitent le lieu et encourage la créativité, même chez ceux qui ne se croient pas « photographes ».
Les retours des visiteurs ont toujours été étonnants : émotion, fierté, reconnaissance de visages oubliés, découverte d’histoires locales, émerveillement devant la créativité des participants. Beaucoup y voient un geste de mémoire, une archive sociale accessible à tous.
Les photos rappellent aussi combien nos villes changent : bâtiments qui s’effacent, commerces qui apparaissent ou disparaissent, traditions qui se transforment. Ces images deviennent alors un héritage visuel, une manière de ralentir le temps.
Quand le projet 365 a commencé, je ne savais pas ce que les gens allaient proposer. Mais la créativité qui en est sortie m’a marquée. J’espère que les générations futures regarderont ces images avec la même curiosité que nous.
Aujourd’hui : Châtenay-Malabry
Je relance aujourd’hui le projet à Châtenay-Malabry, avec la même envie qu’à l’origine : voir un territoire à travers les yeux de celles et ceux qui y vivent, y travaillent, y passent, y aiment, y grandissent.
Châtenay est un territoire riche, contrasté, vivant. Ses parcs, ses rues, ses habitants, ses lieux de vie… Tout change, tout évolue. Et c’est précisément pour cela qu’il est important d’en garder la trace.
Une photo par jour, prise par qui veut. Une année de vie réelle. Un portrait collectif que nous construirons ensemble.
Ce projet appartient à celles et ceux qui y participeront. Et il racontera Châtenay comme aucune carte postale ne pourra jamais le faire.
Nathalie Banaigs

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